Les enseignes de Limoges

en opposition aux règles de l'orthographe et de la syntaxe : observations critiques

« C'était mieux avant »

Mon boucher, rue Fourie, Limoges.

 

François Sauger-Préneuf est un éminent grammairien ayant fait une carrière honorable à Limoges (professeur au Collège royal et correspondant de l'académie des Belles-Lettres et des Sciences). Ses écrits ne parlent d'ailleurs que du bon usage ou du bon goût, que ce soit dans le Dictionnaire des locutions vicieuses ou dans son Histoire de la barbe, petit bijou d'ironie.

Ce petit opuscule est un exemple supplémentaire de ses marottes. La lecture en est plaisante tant dans le propos que dans la forme. On accompagne notre puriste à travers son cheminement dans les rues de la ville, dont certaines aujourd'hui disparues (rue de la Poste-aux-chevaux, rue des Taules, rue des Suisses, rue de l'Arbre-à-peint), et dans sa découverte des commerces dans leur diversité (marchand de Nîmes, marchand de vinaigres, de sabots, de plomb, fabriquant de flanelle et droguets, poêlier-fumiste, perruquier, bains chinois, etc.).

Les fautes épinglées ne manquent pas de charme : « fabriqante de fleurs », « au bergiste, on loge à pieds et à cheval », « apliqueuse de sangsues », « vin a six sous et au-desur », « parapluies an tout ganres ».

On pourrait conclure qu’il s’agit de propos d'un grincheux fustigeant la nouveauté et l'oubli des bonnes manières. Un peu à la manière de Joseph Juge de Saint-Martin (1743-1824) dans Changemens survenus dans les moeurs des habitans de Limoges depuis une cinquantaine d'années, édité en 1817.

Que nenni. Il s'agit plutôt d’acter les progrès de l'étude et du savoir avec un accès à l'enseignement primaire qui s'est développé en cette première moitié du XIXe siècle. Ce qui rend ces fautes, certes anecdotiques, moins acceptables aux yeux de notre professeur au Collège royal. A la fin des 15 pages que compte cette déambulation, l'auteur rédige une fable finale dans laquelle il fustige les « écrivains en l'air » (c'est-à-dire les peintres d'enseignes) en leur demandant un peu plus de sérieux. En vers et en alexandrins comme il se doit !

L'auteur joue de finesse sur un ton, certes, quelque peu moralisateur, mais avec suffisamment d'humour pour en rendre la lecture ludique. Un humour qui n’aurait sans doute pas survécu à la graphie contemporaine des réseaux sociaux.

 

« On ne respecte plus rien ! »

Ma crémière, rue Ferrerie, Limoges

Ce contenu vous a-t-il été utile ?